Sauvez Zelensky ! by Victor K

Sauvez Zelensky ! by Victor K

Auteur:Victor K. [K., Victor]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Thriller, Espionnage, Littérature française, Ukraine
Éditeur: Robert Laffont
Publié: 2022-06-08T22:00:00+00:00


Rodrigue, en survêtement et anorak, chargé comme une mule, remonte l’escalier de l’immeuble de la rue Pyrhova. Il est parti nuitamment faire les courses pour au moins six appartements. Il a de grandes mains, et donc peut se charger de sept à huit sacs compacts. Le supermarché du 41, bulvar Shevchenko, ouvert très tard – il est minuit passé –, reste correctement achalandé.

— Putain d’ascenseur, râle le Catalan.

Il livre d’abord les Melnik, un couple d’octogénaires au deuxième étage, puis leurs voisins de palier, les Kravets. Au troisième, il dépose du Coca pour les trois enfants mal élevés des Kornyenko. Heureusement, les Soroka ont fui vers Lviv : plus personne ne les supportait dans l’abri. Il laisse dans le couloir le ravitaillement pour leurs plus proches voisins, Oleg et Maria, sac de croquettes au saumon de 10 kg pour Olympe, la siamoise, compris, et le leur. Puis il grimpe au quatrième, et frappe doucement à une porte qu’il chérit.

— Oh, Trésor (en français), l’accueille Dariya en peignoir de bain écru.

Vodka, riz, pâtes, raviolis en conserve : que des trucs lourds. Il se demande comment cette fille tient la ligne. Elle ne branle rien de ses journées, avachie sur son canapé devant les chaînes d’info continue étrangères en boucle.

— Ces enculés ont reculé à Kharkiv, lui balance-t-elle en anglais sans le remercier pendant qu’il livre jusque dans la cuisine.

Il hausse les épaules, elle sent satanément bon, c’est un peu sucré, mais il passerait bien une nuit dans cet effluve. Cependant, il ne faut pas rêver, il n’est pas invité. Il redescend d’un étage en petites foulées. La solidarité, ça maintient en forme. Il toque trois coups à leur porte. Ce n’est pas Max qui ouvre, mais une gravure de mode.

Cet enfoiré de Kassim.

Ils se prennent dans les bras. Ils sont comme des frères, Kassim ayant été commandant en second du CPIS de Perpignan où Rodrigue est depuis quinze ans l’instructeur en arts martiaux et combat rapproché. Kass’, c’est la famille. Il lui a bien mis une ou deux raclées en exercice, mais c’était de la tendresse, celle légendaire prodiguée par Rodrigue. Max reste un peu en retrait.

Pour sa part, il n’avait été prévenu qu’au tout dernier moment de la venue d’un visiteur, recevant un message alors qu’il se déplaçait dans les interminables couloirs de la station d’Arsenalna pour juger des capacités d’abri dans le métro kiévin, comme réclamé par les orientations de la Boîte. Des milliers d’habitants avaient trouvé place sous terre à la nuit tombante, bien avant que ne retentissent les sirènes de la défense territoriale. Cet entassement discipliné de familles, leur dignité, avaient entamé le moral de l’agent. Il n’osait pas croiser le regard des uns, des autres, surtout ceux des enfants qui ne comprenaient pas, souvent avec leurs animaux de compagnie dans leurs bras. À la lecture du texto explicite, il avait sauté dans la première rame bleue surchargée, où les yeux étaient baissés.

Max demeure dans cette pudeur. Kassim, Rodrigue. Il a été formé par ces deux statues du Service, et leur doit tant.



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